La caresse des CoquetteS

Maty Biayenda

Pour la rentrée de l'art à Paris, la galerie est heureuse de vous convier à La caresse des Coquettes, la première exposition personnelle de Maty Biayenda, sur un commissariat de Martha Kirszenbaum

Vernissage le Samedi 31 août 2024 de 18h à 21h
Ouverture en simultanée avec les galeries voisines de la rue Chapon

Du 3 septembre au 13 octobre 2024

37 rue Chapon · 75003 Paris
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For the new season opening in Paris, the gallery is pleased to invite you to La caresse des Coquettes, the first solo exhibition of Maty Biayenda, curated by Martha Kirszenbaum

Opening Reception : Saturday, August 31st, from 6 to 9 pm
Opening simultaneously with the other galleries on Rue Chapon

From September 3rd to October 13th, 2024

37 rue Chapon · 75003 Paris

Studio Portrait · July, 2024 · © Léa Simon

«La coquette ne vous caresse

Que pour alarmer la paresse

D'un rival qui n'est point jaloux. »[1]

 

Dans sa comédie en trois actes de 1720, intitulée L’ Amour et la Vérité, Marivaux dissèque avec finesse et cruauté les relations entre maîtres et esclaves au XVIIIe siècle, en opérant une mise en abyme des relations de pouvoir, du rapport dominant/dominé, de l’usage de la force et de l'autorité, et de la convoitise et du désir.

Mêlant peintures sur toile ou sur bois, œuvres sur papier, impressions sur mousseline, vidéos et installations, l’univers artistique de Maty Biayenda apparaît comme un kaléidoscope d’expérimentations esthétiques convoquant un ensemble de personnages, réels ou fictifs, et formant une déambulation enchanteresse entre imaginaire collectif et mémoire personnelle, où séduction et impertinence se jouent des codes sociaux, raciaux et de genre.

L’artiste explore et assemble, en premier lieu, des archives, tantôt personnelles comme ses propres photographies de famille, tantôt historiques comme des documents relatifs à l’histoire des Noirs ou encore des images glanées dans des magazines de mode. D’origine franco-congolaise, ses recherches sur l’objectivation et la libération des corps noirs féminins à travers le concept de fétichisme lui ont permis d’aborder la question des représentations transgenres racisées. Elle constitue ainsi une archive visuelle à partir d’images d’icônes de la nuit, toutes réunies autour de la notion d’identité transgenre et afro-descendante—des reines de beauté du New York des années 1980, aux artistes transformistes caraïbéennes du cabaret parisien de l’après-guerre Chez Madame Arthur, en passant par des fragments d’images tirées de magazines de charme. Pour sa vidéo New Archives (2023), elle juxtapose les images de ces queens avec celles de ses amies filmées avec candeur alors qu’elles racontent leurs déboires amoureux ou leurs transitions.

Les figures fabuleuses auxquelles les travaux de Maty Biayenda font écho semblent tout droit sorties de Paris is Burning, film documentaire culte réalisé en 1990 par Jennie Livingston. Tourné entre le milieu et la fin des années 1980, ce dernier retrace la culture du voguing ball à New York et explore les communautés afro-américaines, latino-américaines, gays et transgenres qui y sont impliquées, formant un hommage poignant et sincère à la vibrante sous-culture new-yorkaise des drag queens et des transsexuels de cette époque. L’une des héroïnes du documentaire, Octavia Saint Laurent, prête d’ailleurs son visage à l’une des œuvres en mousseline de l’exposition, aux côtés de celui de Jenny Bel’Air, figure et icône transgenre de la nuit parisienne des années 1980. Ce jeu de transparence, de non-dits et de suggestions, mêlant visages et biographies d’inconnues ou d’icônes forgent une mythologie personnelle où ils se confrontent aux propres expériences de la vie de l’artiste.

Ce qui se niche au cœur de la pratique de Maty Biayenda est l’attention portée à la notion de communauté, à travers la volonté de l’artiste d’explorer et de dépeindre les liens qui nous unissent. Famille choisie ou sisterhood, les personnages qui habitent ses toiles sont inspirés de ses amies, capturées dans des activités du quotidien—discutant au téléphone, chevauchant une moto ou écoutant de la musique, et dont les expressions sont accentuées par des gestes évocateurs, des regards en coin, et des mimiques savamment orchestrées. Ces œuvres sont aussi le miroir d’une génération de jeunes femmes racisées, portrait rendu d’autant plus percutant par le minutieux travail pictural effectué sur les tons de peau. À travers le jeu de couches et sous-couches que lui permet la peinture, Maty Biayenda décline ainsi à l’infini une palette de bruns poudrés, de beiges dorés, de mauves violacés et de noirs bleutés, formant autant de composantes à une réflexion sur le colorisme, terme dérivé du racisme basé sur le ton de couleur de peau et forgé en 1983 par la militante afro-américaine Alice Walker.

Enfin, La Caresse des Coquettes offre l’expérience d’un voyage cinématographique nous donnant à voir deux mondes, celui, visible, du réel et celui, invisible mais palpable, de la fiction. Un peu à la manière du film Mulholland Drive, réalisé par David Lynch, auquel l’œuvre textile suspendue qui accueille les visiteurs dans l’espace fait implicitement référence, l’exposition nous propose de ne pas choisir entre l’un ou l’autre, mais nous suggère plutôt que l’on ne vit que deux fois, une vie pour nous-mêmes et une pour nos rêves.

[1] Marivaux, L’Amour et la Vérité, 1720.